Anomie

Dans son ouvrage De la division du travail social paru en 1893, le sociologue français Emile Durkheim (1858-1917) présente l’anomie comme une forme pathologique de la division du travail. Elle désigne alors une situation où les règles sont insuffisantes pour maintenir le lien social. Dans Le Suicide (1897), Durkheim fait de l’anomie l’une des causes du suicide : les individus se retrouvent dans une situation anomique si la société ne parvient à contenir leurs désirs, par nature infinis. Chez le sociologue américain Robert K. Merton (1910-2003), l’anomie désigne une situation dans laquelle les individus ne disposent pas des moyens que la société considère comme légitimes pour atteindre les buts qu’elle valorise (par exemple, l’enrichissement et la réussite individuelle), si bien qu’ils n’ont le choix qu’entre renoncer à atteindre ces buts ou bien adopter des moyens illégitimes (par exemple la délinquance) et devenir déviant, ce qui risque alors de remettre en cause la cohésion sociale.

Changement social

Le changement social désigne les transformations à long terme de la société. Il s’agit notamment du recul de la violence, de la massification et démocratisation scolaires, de l’urbanisation, de la salarisation, de l’essor et du déclin de la classe ouvrière, de la tertiarisation de l’emploi (avec la multiplication des emplois de cadres et d’employés), de la féminisation de la population active, de la hausse du chômage et de la précarité, du déclin puis du retour des inégalités, de l’individualisation, de la laïcisation, de l’apparition de la famille nucléaire puis des familles monoparentales, etc. Ces mutations de la société s’expliquent en partie par le progrès technique et par un changement des valeurs et normes en vigueur dans la société. En l’occurrence, les mouvements sociaux peuvent conduire à des changements sociaux, puisqu’ils cherchent précisément à modifier les normes et valeurs de la société.

Cohésion sociale

La cohésion sociale d’un groupe ou d’une société désigne la force et la stabilité des liens entre ses membres. La cohésion d’un groupe ou d’une société sera d’autant plus forte que les liens entre les individus sont forts et que ceux-ci partagent les mêmes normes et valeurs. En l’occurrence, plus elle est forte, plus ses membres sont susceptibles d’être solidaires. Si l’on considère l’intégration sociale comme un processus, la cohésion sociale apparaît alors comme son résultat. La notion de « lien social » peut être utilisée comme synonyme de celle de « cohésion sociale ».

Conflits sociaux

Un conflit social désigne l’antagonisme entre un ou plusieurs groupes sociaux. Puisque les individus n’ont pas les mêmes intérêts, la société est par nature susceptible de générer des conflits sociaux. Toutefois ces conflits ne débouchent pas nécessairement sur des luttes déclarées. De plus, les conflits sociaux ne se résument pas aux conflits du travail. En effet, puisque les intérêts des individus ne sont pas nécessairement d’ordre économique, les conflits sont eux-mêmes susceptibles d’être multidimensionnels. Lorsqu’ils ont pour enjeu de changer, de maintenir ou de rétablir l’ordre social, on parle de mouvements sociaux. Certains considèrent que les conflits sociaux menacent la cohésion sociale ; ils sont « pathologiques » au sens d’Emile Durkheim (1858-1917). D’autres considèrent au contraire que les conflits sociaux peuvent contribuer à la régulation et jouer un rôle dans l’intégration : selon le sociologue allemand Georg Simmel (1858-1918), les conflits sont susceptibles de « rétablir l’unité de ce qui a été rompu », de faire lien social et de socialiser leurs participants.

Désaffiliation

La désaffiliation est le processus par lequel un statut social perd de son caractère protecteur et qui conduit à un affaiblissement des liens sociaux. Par exemple, l’essor des emplois atypiques et de la pauvreté laborieuse accroît la vulnérabilité des salariés. La désaffiliation est susceptible de déboucher en dernière instance à l’exclusion. Ce concept a été développé par le sociologue français Robert Castel (1933-2013).

Disqualification

Le sociologue français Serge Paugam (né en 1960) préfère le terme de « disqualification sociale » à celui d’« exclusion sociale », ne serait-ce parce qu’aucun individu n’est jamais totalement exclu de la société : par exemple, même les SDF continuent d’entretenir des relations sociales. La disqualification est un processus à travers lequel les liens sociaux d’un individu s’affaiblissent en raison d’une perte de protection et de reconnaissance sociale. Non seulement l’individu disqualifié se retrouve vulnérable face à l’avenir, mais il se retrouve aussi sous le poids du regard négatif qu’autrui porte sur lui et qui l’amène peu à peu à intégrer une mauvaise image de soi, le poussant à s’isoler davantage. Le concept de disqualification sociale rejoint l’analyse que le sociologue allemand Georg Simmel (1858-1918) fait de la pauvreté : les pauvres ne sont pas pauvres car ils sont dénués de ressources, mais parce qu’ils reçoivent assistance ou sont susceptibles de la recevoir, c’est-à-dire précisément parce que la société les traite comme pauvres. La pauvreté est ici analysée comme une carrière déviante. Paugam prolonge l’analyse de Simmel et conçoit précisément l’assistance comme un « stigmate » pour les pauvres.

Intégration

L’intégration sociale est le processus par lequel un individu devient membre à part entière d’un groupe social en particulier ou plus largement de la société. La famille, l’école et le travail jouent un rôle primordial dans l’intégration des individus si bien qu’on les qualifie d’instances d’intégration. La socialisation joue un rôle majeur dans l’intégration, puisqu’un individu ne peut pleinement s’intégrer à un groupe que s’il en adopte les normes, les valeurs et la culture. Si l’on considère l’intégration sociale comme un processus, alors la cohésion sociale peut être conçue comme le résultat de ce processus.

Mouvements sociaux

Les mouvements sociaux sont des actions collectives qui remettent en cause l’ordre social et qui visent à le transformer par d’autres moyens que le vote. Ils ont donc une dimension protestataire. Par exemple, les mouvements ouvriers, féministes, écologiques, etc.

Régulation des conflits

La régulation des conflits désigne le processus à travers lequel les règles sont créées et modifiées en vue d’encadrer les conflits et à travers lequel les conflits influencent en retour les règles. Ces règles visent non seulement à canaliser les conflits, mais aussi à permettre leur expression, à encadrer leur forme et finalement à les résoudre, notamment en créant un cadre pour les négociations.

Socialisation

La socialisation désigne le processus par lequel un individu acquiert les normes, valeurs et culture d’un groupe social en particulier ou de la société en général. La socialisation joue un rôle essentiel dans l’intégration sociale, processus par lequel un individu devient membre à part entière d’un groupe social ou de la société. La socialisation est manifeste si l’individu fait l’objet d’un apprentissage intentionnel et explicite ; elle est latente si l’individu intériorise inconsciemment des normes et valeurs au gré de ses interactions sociales. On distingue également entre la socialisation primaire, qui se déroule durant l’enfance et qui intègre à l’individu les normes et valeurs pour vivre dans la société tout en structurant son identité, et la socialisation secondaire, qui se déroule principalement à l’âge adulte à chaque fois qu’un individu cherche à intégrer un groupe, lorsqu’il acquière les normes et valeurs spécifiques à ce dernier. Cette distinction ne doit pas dissimuler le fait que la socialisation est un processus continu. Si la famille et l’école jouent un rôle fondamental dans la socialisation, il existe toutefois d’autres instances de socialisation comme les groupes de pairs (les amis), l’entreprise, les médias, etc.

Solidarité mécanique

Dans son ouvrage De la division du travail social paru en 1893, le sociologue français Emile Durkheim (1858-1917) décrit la solidarité mécanique comme caractéristique des sociétés traditionnelles, essentiellement paysannes. C’est une forme de solidarité « obligée » dans la mesure où les membres d’un groupe se doivent assistance précisément en raison de leur appartenance à ce groupe et de leurs ressemblances. La conscience collective y est forte : les individus partagent les mêmes valeurs et croyances. Lorsque la solidarité est de nature mécanique, le droit est essentiellement répressif : il vise à punir. La notion de solidarité mécanique s’oppose à celle de solidarité organique. En l’occurrence, le passage d’une solidarité mécanique à une solidarité organique correspond au processus d’individuation et il n’est possible qu’avec l’approfondissement de la division du travail.

Solidarité organique

Dans son ouvrage De la division du travail social paru en 1893, le sociologue français Emile Durkheim (1858-1917) décrit la solidarité organique comme caractéristique des sociétés modernes, essentiellement urbaines. Elle repose sur la division du travail (social) qui donne une place spécifique à chacun et qui rend par conséquent les individus complémentaires les uns aux autres et interdépendants : c’est parce qu’ils sont différents que les individus sont solidaires entre eux. C’est une forme de solidarité « élective ». Dans une société moderne, la conscience collective y est plus faible, au profit des consciences individuelles : les individus ont des croyances fortement différenciées. Lorsque la solidarité est de nature organique, le droit est essentiellement restitutif : il vise davantage à compenser les préjudices plutôt qu’à punir. La notion de solidarité organique s’oppose à celle de solidarité mécanique. En l’occurrence, le passage d’une solidarité mécanique à une solidarité organique correspond au processus d’individuation et il n’est possible qu’avec l’approfondissement de la division du travail. Si la division du travail ne parvient toutefois pas à générer suffisamment de solidarité, les individus risquent de se retrouver dans une situation d’anomie.

Syndicat

Un syndicat est une organisation chargée de défendre les intérêts du groupe professionnel qu’elle représente. En France, les syndicats sont autorisés depuis la loi Waldeck-Rousseau en 1884. La liberté syndicale a été inscrite dans la constitution française en 1946. Les syndicats jouent un rôle essentiel dans la régulation des conflits, non seulement en étant initiateurs dans l’expression des revendications, mais aussi en étant un interlocuteur privilégié dans les négociations avec les entreprises et un véritable partenaire des autorités publiques. Si les syndicats désignent généralement les syndicats de salariés, il existe également des syndicats patronaux et des syndicats de professionnels indépendants.



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