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« Les économies avancées sont mieux équipées pour absorber les coûts des désastres en raison du recours à l'assurance privée, des niveaux plus élevés d'épargne domestique et de recettes fiscales, ainsi que de l'accès aux financements de marché si nécessaire. Elles ont souvent consacré davantage de ressources domestiques pour réduire ex ante la vulnérabilité, y compris, par exemple, en renforçant le code du bâtiment et en disposant d'une solide infrastructure d’intervention en cas d’urgence.

(...) Les pays à faible revenu, par contre, sont plus vulnérables aux chocs exogènes, y compris les catastrophes naturelles. Les pays pauvres ont une plus large part de leur population résidant dans les zones à haut risque avec une faible infrastructure. Leur activité repose davantage sur secteurs tels que l'agriculture et le tourisme qui dépendent directement des conditions météorologiques. (…) Les économies les moins diversifiées subissent de plus larges déclins de la consommation suite aux tremblements de terre.

(…) Il n'existe pas de mesure standard pour déterminer un chiffre global pour l'impact économique. En règle générale, les effets sont mesurés dans la littérature comme directs et indirects. Les coûts directs résultent de la perte immédiate en capital physique et en capital humain, ainsi qu’en surfaces cultivés, et la perte des recettes subie à court terme en raison de la perturbation de l'activité économique dans les secteurs privé et public. Les pertes indirectes sont celles qui ne sont pas provoquées par la catastrophe elle-même, mais par ses conséquences. Par exemple, une usine qui ne serait pas endommagée par un tremblement de terre peut subir des interruptions d’activité en raison de pannes de courant dans les mois suivants. Les coûts indirects se diffusent à l’ensemble de l'économie au cours du temps et affectent l'investissement, la production, les comptes publics et extérieurs, la dette et la pauvreté.

La valeur monétaire des dommages causés par les catastrophes naturelles est beaucoup plus importante dans les économies avancées, car l'accumulation et la concentration de capital, ainsi que les pertes potentielles, y sont beaucoup plus élevées que dans les pays à faible revenu. Cependant, en pourcentage de la production nationale, les dégâts sont généralement beaucoup plus importants dans les pays en développement. Les pays à revenu intermédiaire sont fortement affectés par les catastrophes naturelles en termes de PIB, comme leurs bases d'actifs augmentent plus rapidement que leur capacité à absorber le coût des catastrophes. En outre, leurs secteurs sont plus interconnectés que dans les pays à faible revenu, mais ils n'ont pas les systèmes et les mécanismes de secours dont disposent les économies avancées. (…)

Les dommages estimés des catastrophes naturelles au cours des 50 dernières années continuent d'augmenter, même si la fréquence des catastrophes a quelque peu diminué au cours des dix dernières années. Les conclusions générales de la littérature sont que les catastrophes naturelles ont un impact négatif significatif sur le PIB réel, bien que celui-ci diffère selon le type de catastrophe. Les catastrophes modérées peuvent en effet relever les taux de croissance économique via la stimulation des investissements des activités de reconstruction, mais les catastrophes sévères n’ont quant à elles jamais d’effets positifs sur la croissance. Les catastrophes majeures réduisent le PIB réel par habitant de 0,6 % en moyenne et ce chiffre s’élève à environ 1 % dans les pays à faible revenu. (…) Les catastrophes entraînent une chute d’environ 0,7 point de pourcentage du taux de croissance d'un pays lors de la première année, ce qui conduit à une perte cumulée de la production de 1,5 % en moyenne (…). Des niveaux d'éducation plus élevés, une plus grande ouverture et une plus grande profondeur du secteur financier sont associés à une réduction des coûts des catastrophes naturelles. Parmi les catastrophes climatiques, les sécheresses ont le plus large impact moyen, avec des pertes de 1 % du PIB par habitant et de plus de 2 % par habitant dans les pays à faible revenu. Dans les petits États insulaires, les ouragans ont un plus grand impact estimé, qui se traduit en moyenne par une baisse de 3 % du PIB par habitant. (…)

Les catastrophes naturelles majeures dégradent en général les comptes extérieurs. Comme l'activité économique est perturbée, les gains à l’exportation déclinent, tandis que les importations d’aliments et de matériels nécessaires à la reconstruction gonflent la facture des importations, ce qui contribue à une détérioration de la balance commerciale. Le compte courant extérieur se détériore souvent, mais cette dégradation est généralement atténuée par des entrées plus importantes d'aides publiques et de fonds privés. (…)

Les catastrophes naturelles peuvent avoir un impact négatif important sur les comptes publics et la dette publique, mais cela dépend de la façon par laquelle les gouvernements réagissent à la catastrophe. En règle générale, les recettes fiscales diminuent comme l'activité économique se contracte, tandis qu’au même instant les secours et la reconstruction conduisent à une forte hausse des dépenses publiques. (…) Les pays avec les systèmes financiers les plus développés souffrent moins en termes de pertes de production, mais les déficits budgétaires s’aggravent davantage dans ces mêmes pays. Parmi ces pays, ceux ayant un taux élevé de pénétration de l'assurance souffrent de moindres pertes réelles, mais ne subissent pas de dégradation des déficits budgétaires.

Dans les pays à faible revenu, l'impact est plus prononcé, y compris sur la pauvreté et le bien-être social. Les cessions de capital physique auxquelles procèdent les pauvres suite aux catastrophes, telles que la vente de bétail pour financer la consommation courante, peuvent conduire à un déclin de la capacité de production à long terme. Les effets indirects, notamment l'inflation, ont aussi tendance à pénaliser les pauvres de manière disproportionnée parce qu'ils ont les qualifications professionnelles limitées et que leur panier de consommation est fortement concentré sur la nourriture. Les pays dont les déficits sont financés principalement par des subventions et qui bénéficient d’un fort soutien des donateurs sont en mesure de s'adapter plus rapidement, mais dans de nombreux cas les emprunts publics et de la dette publique s’accroissent relativement au PIB. »

Nicole Laframboise et Boileau Loko, « Natural disasters: mitigating impact, managing risks », FMI, working paper, n° 245, 9 octobre 2012.