« L'objectif du Rapport sur le développement humain publié par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), est de rappeler que le PIB n'est pas la seule chose qui compte. Oui, le revenu est important, mais il en va également de l'éducation, de la santé, des inégalités de revenus, du traitement en fonction du sexe et de la race (…), et de nombreuses autres dimensions. Chaque année, le rapport produit des tableaux détaillés sur de nombreuses mesures de bien-être, y compris un indice de développement humain qui classe les pays selon une combinaison pondérée de l'espérance de vie, de l'éducation et du revenu. L’édition de 2013 du Rapport sur le développement humain a pour thème "L’Essor du Sud : le progrès humain dans un monde diversifié". Il souligne que les pays du monde connaissent une convergence des valeurs de l'IDH : autrement dit, les gains dans les pays à revenu faible et intermédiaire sont plus élevés que les gains des pays à haut revenu.

"Au cours des dernières décennies, les pays à travers le monde ont convergé vers des niveaux plus élevés de développement humain, comme le montre l'Indice de Développement Humain (IDH), une mesure composite des indicateurs selon trois dimensions : l'espérance de vie, niveau d'instruction et le commandement sur les ressources nécessaires pour mener une vie décente. Tous les groupes et toutes les régions ont connu une amélioration notable de toutes les composantes de l'IDH, avec des progrès plus rapides dans les pays ayant un IDH faible ou moyen."

Bien sûr, l'IDH est lui aussi inévitablement imparfait. Le but de cette mesure est de nous faire rappeler les multiples dimensions du bien-être humain, de ne pas oublier que l’on ne peut prétendre que le bien-être puisse être capturé par un unique chiffre. Comme l'écrit Amartya Sen, dans certains commentaires qui accompagnent le rapport 2013 : "Le produit intérieur brut (PIB) est beaucoup plus facile à voir et à mesurer que la qualité de vie humaine que mènent les gens. Mais le bien-être et la liberté, et leurs liens avec l'équité et la justice dans le monde, ne peuvent pas être réduits simplement à la mesure du PIB et de son taux de croissance, comme beaucoup de gens sont tentés de le faire. Il est essentiel de reconnaître la complexité intrinsèque du développement humain... Nous pouvons, pour des raisons de commodité, utiliser de nombreux indicateurs simples de développement humain, tels que l'IDH, sur la base de seulement trois variables avec une règle très simple pour les pondérations, mais la quête ne peut pas s'arrêter là.... Evaluer la qualité de vie est un exercice beaucoup plus complexe que ce qui peut être capturé par un seul chiffre…"

Chaque année, le Rapport sur le Développement humain est un trésor de graphiques, de tableaux et de données empiriques. Ici, je vais me focaliser sur un thème qui a attiré mon attention : la relation entre la mondialisation et le développement humain. J'entends parfois certains se plaindre que la mondialisation ne bénéficie qu’aux pays à revenu élevé et aggrave la situation du reste du monde. Mais cette plainte ne semble pas fondée. Comme l’a déclaré Kofi Annan il y a quelques années, lorsqu’il était secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, les "principaux perdants dans le monde très inégal d'aujourd'hui ne sont pas ceux qui sont trop exposés à la mondialisation. Ce sont ceux qui ont été laissés de côté."

Voici un tableau illustrant ce point. L'axe horizontal représente le changement dans le ratio commerce/production de 1990 à 2010. L'axe vertical indique le "progrès humain", tel qu’il est mesuré par l'amélioration relative de l’IDH. De toute évidence, les pays ayant les plus grands changements dans le ratio commerce/production obtiennent en moyenne des gains d’IDH relativement plus élevés. A l'inverse, les pays où le ratio commerce/production a chuté étaient susceptibles d’obtenir des gains d'IDH relativement plus faibles.

GRAPHIQUE Progrès humain et expansion du commerce dans le Sud
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Voici les commentaires du Rapport sur le Développement Humain sur notre économie mondialisée : "Le Sud a besoin du Nord et le Nord a de plus en plus besoin du Sud. Le monde est de plus connecté, pas moins. Ces dernières années ont vu une remarquable réorientation de la production mondiale, avec une part beaucoup plus grande destinée au commerce international, ce dernier représentant, en 2011, près de 60 % de la production mondiale Les pays en développement ont joué un rôle important : entre 1980 et 2010, ils ont accru leur part dans le commerce mondial des marchandises de 25 % à 47 % et leur part de la production mondiale de 33 % à 45 %. Les régions en développement ont également renforcé les liens les uns avec les autres : entre 1980 et 2011, les échanges Sud-Sud sont passés de moins de 8 % du commerce mondial des marchandises à plus de 26 %... Les marchés mondiaux ont joué un rôle important dans les progrès. Tous les pays nouvellement industrialisés ont comme stratégie d'"importer ce que le reste du monde sait faire et d’exporter de ce qu'il veut".

Que ce soit pour un pays à revenu élevé comme les Etats-Unis ou pour tout autre pays dans le monde, le chemin vers un meilleur niveau de vie moyen implique un plus grand engagement dans l'économie mondiale, et non une moindre ouverture. »

Timothy Taylor, « The Rise of the Global South », in The Conversable Economist, 27 mars 2013.