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« Les études qui ont observé quelles ont été les performances des économies avancées pendant et après la Grande Récession de 2008-2009 offrent un éclairage sur les risques budgétaires auxquels ces économies font face et sur l'efficacité de l'utilisation de la politique budgétaire pour stabiliser l'économie. Un nouveau document des services du FMI se penche sur les leçons que la récente crise nous donne à propos du rôle de la politique budgétaire dans les économies avancées.

"Notre étude a des implications intéressantes pour les décideurs politiques, en particulier concernant l’usage de la politique budgétaire comme outil pour stabiliser l'économie, mais aussi sur la façon de gérer les risques budgétaires et la dette publique élevée", a déclaré Bernardin Akitoby, chef du Département des finances publiques du FMI. "D'une part, nous constatons que la politique budgétaire peut avoir de puissants effets à court terme sur l'économie lorsque les conditions économiques ressemblent à celles qui ont prévalu dans de nombreuses économies avancées au cours des dernières années. Nous constatons aussi que les économies avancées sont exposées à des chocs plus grands que prévus et ont par conséquent besoin de marges de manœuvre budgétaires plus importantes que ce que nous ne le pensions" (…).

La politique budgétaire pour lutter contre la récession

Le document passe en revue ce que les économistes ont appris avec la crise à propos de l'efficacité de la politique budgétaire comme outil pour stabiliser l'économie. De récentes études montrent que les préoccupations que certains nourrissaient avec la crise concernant les effets de la politique budgétaire et les problèmes de mise-en-œuvre liés à la relance budgétaire discrétionnaire étaient exagérées. L'étude conclut que, sous certaines conditions, la politique budgétaire peut avoir de puissants effets sur l'économie à court terme. Ses effets sont plus importants lorsque les banques centrales ne peuvent réduire les taux d'intérêt en dessous en raison de la borne zéro, lorsque le secteur financier est affaibli et lorsque la production se maintient à un niveau sensiblement inférieur à son potentiel. De nouvelles analyses ont également mis en doute certaines études d’avant-crise qui suggéraient que les contractions budgétaires pouvaient avoir un effet expansionniste sur la production.

La crise a également montré qu’il ne faut pas tarder pour concevoir et mettre en œuvre les mesures de relance économique (…). En outre, la plupart des mesures de relance temporaires ou ont été annulées après que la phase initiale de la crise ait été passée, balayant l’idée que les responsables politiques ne seraient pas disposés à inverser les mesures de relance une fois la reprise de l’activité amorcée. Néanmoins, certaines des interrogations d’autrefois quant à savoir si les mesures de relance discrétionnaire seront réalisées en temps opportun et seront réversibles restent valables, en particulier lors de récessions moins sévères. (...)

Les risques budgétaires et la soutenabilité de la dette

L’article examine également les risques budgétaires auxquels les économies avancées font face et comment celle-ci peuvent mieux se préparer à gérer de tels risques à l'avenir. Alors que l’éclatement d’une véritable crise budgétaire dans les économies avancées était généralement considéré comme une lointaine possibilité avant la crise, les événements survenus depuis 2008 ont montré que ce n’était pas le cas. L’étude démontre que les marges de manœuvre budgétaires des pays avancés n'étaient pas assez larges pour leur permettre d'absorber facilement les sévères chocs économiques qu'ils ont subis, plusieurs pays ayant en effet connu une crise de la dette souveraine.

Une leçon que le document tire de ces expériences est que les gouvernements doivent adopter une approche "basée sur le risque" pour analyser la soutenabilité de leur dette publique, y compris les risques du secteur financier et d'autres vulnérabilités budgétaires spécifiques à leur pays. En retour, le niveau d'endettement qui pourrait être considéré comme "sûr" pour un pays donné dépendra des risques auxquels celui-ci est confronté. D'une manière générale, comme ils reconstituent leurs marges de manœuvre budgétaire, les décideurs prudents voudront certainement parvenir à un niveau de dette à long terme qui sera inférieur à ce qui était considéré comme raisonnable avant la crise.

La conception des ajustements budgétaires

Compte tenu de la nécessité de diminuer les niveaux de dette publique, l’étude examine ensuite le rythme qui est approprié pour resserrer la politique budgétaire et ce qui constitue la meilleure combinaison de recettes et de dépenses pour cet ajustement budgétaire.

Les économistes doutent de plus en plus du bien-fondé de toujours faire la majeure partie de l'ajustement budgétaire au plus tôt. Plutôt, la vitesse à laquelle un pays doit ajuster ses finances publiques dépend de l'état de l'économie, de l'état des finances publiques et de l'ampleur des pressions exercées par les marchés financiers.

L’étude constate que la plupart des économies avancées doivent aujourd'hui s’ajuster à un rythme progressif, selon un plan à moyen terme crédible, afin de limiter l'impact du resserrement budgétaire pourrait avoir à court terme sur la croissance. Mais trop retarder l'ajustement serait imprudent. Le risque est que les épargnants perdent confiance dans la volonté du gouvernement à assainir finances publiques et commencent à exiger des taux d'intérêt plus élevés, ce qui, à des niveaux d'endettement élevés, pourrait rapidement placer la dynamique d’endettement sur une spirale hors de contrôle. Les pays qui sont sous la pression des marchés financiers ou qui ont perdu l'accès aux marchés peuvent avoir peu de choix, sauf à réaliser leurs ajustements de façon frontale. Même pour ces pays cependant, il peut y avoir une "limitation de vitesse" pour le rythme de l'ajustement, au-delà de laquelle un ajustement plus rapide pourrait se révéler contre-productif.

Bien que les études sur la meilleure combinaison des mesures d'ajustement soient moins claires, l’étude souligne l'importance de prendre en compte des considérations d'équité (…). Le document affirme également qu’augmenter les impôts lorsque le fardeau fiscal est déjà élevé peut nuire à la croissance potentielle d'un pays, si bien que les pays ayant une pression fiscale relativement élevée devraient avant tout réduire leurs dépenses publiques. Les pays avec de moindres niveaux de dépenses et de recettes auraient plus de latitude pour augmenter les recettes. »

Institutions et transparence budgétaires

La crise a mis en évidence combien il est important d'avoir des institutions budgétaires en bon fonctionnement, y compris des outils comme les cadres budgétaires à moyen terme et des règles budgétaires, afin d'assurer que la politique budgétaire reste soutenable.

Les cadres budgétaires à moyen terme et les règles budgétaires doivent être crédibles, mais les économistes du FMI constatent qu'ils doivent également être suffisamment souples pour répondre aux fluctuations économiques. Ces outils doivent être conçus de manière à éviter les dépenses excessives en période de bonne conjoncture (en ciblant l’équilibre budgétaire structurel, par exemple) et qu’ils doivent également inclure des "clauses de sauvegarde" qui permettent aux pays d’utiliser plus librement la politique budgétaire pour soutenir l'économie lorsqu’elle est frappée par grands chocs économiques. Des organismes budgétaires indépendants peuvent aider à surveiller à ce que les règles soient respectées et à s'assurer que les gouvernements n’abusent pas d’une plus grande flexibilité.

La crise a également révélé des lacunes en matière de transparence budgétaire. Le document conclut que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour améliorer la rapidité et la couverture institutionnelle des rapports budgétaires. En outre, les pays devraient publier des évaluations des risques budgétaires pour indiquer plus clairement les sources de risques budgétaires. »

FMI, « Crisis offers preliminary lessons on fiscal policy », IMF Survey, 17 septembre 2013.