La croissance, une parenthèse historique

« L’économiste et historien Angus Maddison a retracé la croissance mondiale du PIB sur plus de 2000 ans. Sur les 1000 premières années de notre ère, les chiffres reconstitués par l’historien présument une progression relativement lente. C’est la Révolution industrielle qui marque à partir du dix-neuvième une première envolée dans les pays industrialisés. Le vingtième siècle va, lui, dévoiler une croissance vertigineuse. Durant ce seul siècle, le PIB mondiale est multiplié par plus de 18, soit autant que lors des 19 siècles précédents.

De la révolution néolithique jusqu’à la Révolution industrielle du dix-huitième siècle, il y a une loi simple qui habite (...) toutes les civilisations humaines, c’est la loi de Malthus. Quels que soient les progrès dans les techniques agricoles (qui permettent au fond de mieux se nourrir à partir des mêmes quantités de terres), l’explosion démographique que ce bien-être apporte fait que (...) le nombre d’habitants augmente et non pas le revenu par d’habitants. Ricardo, Adam Smith et les auteurs classiques sont tous malthusiens. Mais la question de la croissance, au sens où on l’entend aujourd’hui, c’est-à-dire la capacité d’une société à se hisser continûment au dessus d’elle-même, grâce aux progrès, aux techniques, c’est une question que ne se posent pas ces auteurs, parce que tout simplement ils n’y croient pas. (…)

La machine à vapeur de monsieur Watt va clore le 18ième siècle et faire du 19ième siècle celui de la Révolution industrielle. On y voit à l’œuvre pour la première fois les moteurs de la croissance telle qu’elle s’est imposée au cours des siècles. Des innovations techniques majeures, l’entrée en scène de la finance qui, avec la Bourse et les sociétés par actions, pourvoit aux investissements, et une main-d’œuvre abondante et bon marché avec le prolétariat qui quitte les campagnes pour les faubourgs des villes. »