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« On peut dire que le principal moteur de la croissance économique américaine et même de la croissance mondiale au cours du dernier quart de siècle a été la loi de Moore. Gordon Moore, l'un des fondateurs d'Intel Corporation, est le premier à avoir affirmé, en 1965, que le nombre de transistors sur une puce d'ordinateur doublait tous les deux ans. Cette loi sera-t-elle encore vérifiée pendant longtemps ? Harald Bauer, Jan Vieira et Florian Weig du McKinsey Global Institute tentent de répondre à cette question dans leur article "Moore’s law: Repeal or renewal?" qui a été publié en décembre 2013. Ils écrivent :

"La loi de Moore stipule que le nombre de transistors sur les circuits intégrés double tous les deux ans. Au cours des quatre dernières décennies, elle a impulsé le rythme des progrès dans l'industrie des semi-conducteurs. Les retombées de (…) la loi de Moore incluent les réductions de coûts, que l’on obtient en plaçant davantage de transistors par unité de surface sur les puces de silicium, et les améliorations de performances en matière de vitesse, de compacité et de consommation d'énergie… La loi de Moore s’est traduite par une chute continue des prix des semi-conducteurs. Les prix par bit des puces de mémoire vive dynamiques, par exemple, ont chuté de près de 30 à 35 % par an pendant plusieurs décennies.

Par conséquent, la loi de Moore a marqué une grande partie du monde moderne. Certaines estimations suggèrent que 40 % de la croissance de la productivité mondiale qui a été observée au cours des deux dernières décennies s’expliquent par les progrès dans les technologies de l'information et de la communication, eux-mêmes rendus possibles par les améliorations apportées dans les performances et les coûts des semi-conducteurs".

Les auteurs affirment que les progrès technologiques qui sont déjà à l’œuvre vont permettre à la loi de Moore d’être valide pendant encore 5, voire 10 ans. Comme je l'ai écrit auparavant, la puissance du doublement est difficile à apprécier au niveau intuitif, mais cela signifie que la hausse est aussi importante que tout ce qui s’est déjà passé. Intel grave maintenant des transistors de 22 nanomètres et, comme l'entreprise l’indique, vous pourriez faire tenir 6000 de ces transistors sur la largeur d'un cheveu humain ou, si vous préférez, il faudrait 6 millions de ces transistors de 22 nanomètres pour couvrir le point à la fin d'une phrase. En outre, un transistor de 22 nanomètres peut s’allumer et s’éteindre 100 milliards de fois par seconde.

Les analystes de McKinsey soulignent que, s'il est techniquement possible que la loi de Moore reste valide, les coûts économiques des nouvelles avancées commencent à devenir très élevés. (…) "Une analyse de McKinsey montre que le passage des transistors de 32 nanomètres à 22 nanomètres sur des plaquettes de300 millimètres implique un accroissement des coûts de fabrication d'environ 40 %. Il s’accompagne également d’une hausse d’environ 45 % des coûts associés au développement des processeurs et une hausse de 50 % des coûts associés à la conception des puces. Ces fortes hausses vont entraîner des coûts de développement qui dépasseront 1 milliard de dollars pour des transistors inférieurs à 20 nanomètres. Par ailleurs, les usines nécessaires à leur production vont probablement coûter 10 milliards de dollars, voire plus. Par conséquent, le nombre d'entreprises capables de financer les transistors et usines de la prochaine génération va probablement diminuer. "

Bien sûr, il est également possible d’obtenir des améliorations de performances et des baisses de coûts sur les puces qui sont déjà en production : par exemple, ce qui constitue le nec plus ultra des puces informatiques aujourd'hui va probablement ressembler à une antiquité bon marché dans cinq ans. Je pense que nous sommes à peine en train de concevoir comment les technologies d'information et de communication peuvent modifier notre vie professionnelle et privée. Mais on ne pourra repousser indéfiniment les problèmes physiques et les coûts plus élevés associés à la réalisation de transistors d’une taille toujours plus petite. »

Timothy Taylor, « Moore's law: At least a little longer », in Conversable Economist (blog), 18 février 2014. Traduit par Martin Anota


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