« La répartition du patrimoine n’est pas la même chose que répartition du revenu : le patrimoine désigne l’accumulation d’actifs au cours du temps, tandis que le revenu désigne ce qu’un ménage reçoit au cours d’une année. Personne ne s’attend à ce que tout le monde ait le même patrimoine, ne serait-ce parce qu’il est logique que les personnes âgées de 55 ou 60 ans aient accumulé plus d’actifs que celles âgées de 25 ou 30 ans. Mais cela dit, lorsque la répartition globale du patrimoine change au cours du temps, il est légitime de s’interroger.

Fabian Pfeffer, Sheldon Danziger et Robert Schoeni passent en revue les preuves empiriques dans "Wealth levels, wealth inequality, and the Great Recession", un résumé paru en juin 2014 de l’étude qu’ils avaient précédemment publié dans la revue The Annals of the American Academy of Political and Social Science en novembre 2013 (…).

Beaucoup de cette étude repose sur la Panel Study of Income Dynamics, un fascinant ensemble de données qui débuta avec un échantillon nationalement représentatif de 18000 personnes réparties en 5000 familles en 1968 et qui suit depuis lors ce groupe de ménages, ainsi que leurs enfants et petits-enfants au fil des mariages et remariages. L’étude couvre maintenant quelques 9000 familles et 22000 individus. (…) La PSID suit les ménages au cours du temps.

Variation en volume du patrimoine pour divers centiles (en %)

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source : Pfeffer et ses coauteurs (2014)

Voici les évolutions qu’a connues le patrimoine ces dernières décennies telles que le suggèrent les données du PSID. Les données sont présentées en centiles. Ainsi le 95ième centile de la répartition du patrimoine vit son patrimoine s’accroître de plus de 100 % en termes réels entre 1984 et 2007, avant de chuter lors de la Grande Récession. Le ménage médian (le 50ième centile) vit son patrimoine grimper de presque 50 % entre 1984 et 2007, mais avec le déclin du patrimoine que l’on a pu ensuite observer le ménage médian a moins de patrimoine aujourd’hui qu’en 1984. Le 25ième centile n’a pas beaucoup de patrimoine et connut peu de changement de son patrimoine entre 1984 et 2005, mais il le vit ensuite chuter avec la Grande Récession. Cette dynamique présente clairement une plus grande dispersion de richesse au cours du temps. (…)

A court terme, en l’espace de quelques années, par exemple sur la courte période de temps qui s’est écoulée depuis la grande Récession jusqu’à aujourd’hui, la répartition du patrimoine évolue essentiellement en fonction de la valeur des actifs que possèdent les gens, en particulier en fonction des prix immobiliers et des prix des actifs financiers. Aucun des groupes de revenu n’a connu une reprise depuis que la Grande Récession a détérioré leur patrimoine. Mais ceux à plus haut patrimoine avaient déjà une sacrée avance, alors que ceux qui ne possèdent presque aucun patrimoine étaient bien loin derrière. »

Timothy Taylor, « The shifting U.S. wealth distribution », in Conversable Economist (blog), 9 juillet 2014. Traduit par Martin Anota