« Si nous comparons les performances des différents pays depuis le début de la crise financière mondiale, c’est pour déceler les dynamiques qui expliquent les différences de comportements et tirer des enseignements pour la prochaine crise. Lorsque nous effectuons ces comparaisons, nous oublions des fois que regarder la croissance du PIB ne nous donne pas toujours toutes les informations dont nous avons besoin pour comprendre les écarts de performances que nous voyons d’un pays à l’autre. Ces derniers peuvent en effet s’expliquer par des facteurs relatifs à la démographie, au marché du travail et à la productivité ; en outre, même si ces trois facteurs peuvent être corrélés au cours du temps, ce n’est pas toujours le cas.

Voici un petit survol de la période 2007-2013 pour un ensemble de pays avancés. Les graphiques ci-dessous représentent le niveau de l’activité en 2013 rapporté à son niveau en 2007.

Commençons avec le PIB.

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Nous voyons les suspects habituels en bas de la liste et nous voyons aussi à droite les pays qui ont réussi à faire mieux durant les années de crise. Le Japon et le Royaume-Uni se situent au milieu de la liste.

Nous corrigeons maintenant le potentiel impact des changements démographiques dans la population en âge de travailler (en l’occurrence âgée entre 16 et 64 ans).

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Pas beaucoup de changements sauf pour le Japon où la performance semble un peu meilleure puisqu’il se classe deuxième dans cette liste. (Petite mise en garde : tout définition de la population en âge de travaille risque d’être problématique. Dans plusieurs pays, en particulier les Etats-Unis, les taux d’activité pour les plus de 64 ans sont élevés et continuent d’augmenter, si bien que cette statistique est susceptible de nous donner une image biaisée du vrai niveau de la population potentiellement active.)

Finalement, que nous nous indique le PIB par travailleur ? Il nous donne une idée de la performance de la productivité de ceux qui sont en emploi, abstraction faite de la performance du marché du travail (c’est-à-dire de sa capacité à employer la population en âge de travailler).

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C’est une mesure approximative de la productivité qui est affectée par plusieurs facteurs, notamment la possibilité de réallocations sectorielles, dans la mesure où les secteurs les moins productifs subissent un plus fort ralentissement de l’activité.

Certaines choses ne changent pas, l’Italie et la Grèce restent en bas de la liste. Mais il y a des changements en haut. En particulier, le Royaume-Uni est désormais le pays ayant connu la troisième plus mauvaise performance et le Japon revient au milieu du classement. Dans la zone euro, le plus grand changement concerne l’Irlande et l’Espagne, tous deux se classant parmi les trois premiers. Cela signifie que, pour ces deux pays, la performance du marché du travail est le principal frein sur leur performance du PIB. L’Allemagne chute dans la moitié inférieure du classement, ce qui suggère que la forte performance du marché du travail allemand a compensé une croissance modeste du PIB par travailleur. »

Antonio Fatás, « Which countries managed the Great Recession better? », in Antonio Fatás on the Global Economy (blog), 1er février 2015. Traduit par Martin Anota