« Une croissance plus forte qu’attendue en France et en Espagne (s’élevant respectivement à 0,5 % et 0,8 % au premier trimestre de l’année 2016, 0,1 point de pourcentage supérieur à ce qui était attendu !) a stimulé la croissance de la zone euro en l’amenant à 0,6 % au premier trimestre de l’année. Le Financial Times note que le PIB est désormais supérieur à son niveau d’avant-crise. (…)

Voici quelque chose à ne pas oublier :

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Le graphique se passe de commentaires. Alors que nous avons perdu une décennie, les Etats-Unis et les pays de l’OCDE dans leur ensemble avaient dépassé leur niveau d’avant-crise au deuxième trimestre de l’année 2011. Nos voisins d’outre-Manche ont dépassé leur niveau d’avant-crise au deuxième trimestre 2013. De plus, nous sommes les seuls à avoir connu une récession à double creux (double-dip recession) et nous sommes les seuls à toujours combattre des pressions déflationnistes.

Bien sûr, si nous regardons le PIB par tête (…), le scénario d’une décennie perdue semble encore se préciser davantage :

Francesco_Saraceno__PIB_reel_par_tete__zone_euro_Grece.png

Il ne faut pas non plus oublier la situation grecque. Le pays est de retour à la case départ, prêt pour un nouveau cycle de négociations difficiles. Et je crois qu’il peut être utile de nous rappeler ce qu’ils ont enduré.

Ainsi, dites-le-moi à nouveau, qu’est-ce que nous célébrons ? »

Francesco Saraceno, « Celebrate », in Sparse Thoughts of a Gloomy European Economist (blog), 29 avril 2016. Traduit par Martin Anota



« Qui enregistra la plus forte croissance au début de l’année 2016 ? Les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou la zone euro ? La réponse est la zone euro. La croissance à 0,6 % pour le premier trimestre (environ 2,5 % en rythme annuel) ne mérite pas des applaudissements, mais c’est tout de même réjouissant. C’est un rythme de croissance que nous devrions pouvoir obtenir sans en être surpris. La BCE stimule l’économie autant qu’elle le peut et la contraction budgétaire s’est stoppée.

L’inflation est toujours inférieure à sa cible, mais la raison qui l’explique est assez simple (…) les capacités de production sont toujours très loin d’être pleinement utilisées. L’inflation va seulement se stabiliser autour de la cible de 2 % quand les capacités de production seront pleinement utilisées. La politique économique doit contribuer (notamment l’investissement public !) à ce que cela soit possible grâce à une accélération de la croissance et non pas par une contraction progressive de l’offre, comme cela semble avoir été le cas au Royaume-Uni. Concernant l’inflation, la BCE doit cibler une inflation de 2 %, plutôt que de rechercher une inflation "inférieure à, mais proche de, 2 %", pour éviter le problème japonais (...).

(…) Je pense que la zone euro peut connaître une forte croissance avant 2020. Par "forte croissance", j’entends une croissance supérieure à 2,5 %. J’y crois parce que je n’avais pas seulement en tête l’idée que la politique budgétaire resterait neutre et la politique monétaire expansionniste, mais que je prenais aussi en compte les récentes gains de compétitivité associés à l’euro. Comme Martin le souligne, jusqu’à présent cela n’a pas vraiment contribué aux récentes performances de croissance de la zone euro.

J’ai lu certains commentaires suggérant que la compétitivité internationale n’importe pas autant qu’autrefois. Je suis d’accord avec Paul Krugman lorsque ce dernier affirme que ce pessimisme ne trouve pas vraiment de justifications. J’ai passé une grande partie de mon temps à estimer les élasticités des échanges (l’impact de la compétitivité internationale sur le commerce et donc la demande) et cette expérience m’a enseigné que cet effet ressemble à la description que Milton Friedman fait du fonctionnement de la politique monétaire : il peut y avoir des délais longs et variables. Donc je m’attends à ce que les gains de compétitivité que la zone euro a obtenus au cours des dernières années commencent à stimuler le PIB de la zone euro d’ici un à deux ans, si bien qu’il ne sera pas improbable que la croissance soit plus rapide que ce que nous avons pu voir au début de l’année 2016. »

Simon Wren-Lewis, « The Eurozone recovery », in Mainly Macro (blog), 6 mai 2016. Traduit par Martin Anota