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Tag - croissance chinoise

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vendredi 10 juin 2016

Spéculons un peu sur la croissance chinoise

« Le ralentissement de la croissance chinoise a été interprété comme résultant d’une transition naturelle vers un rythme de croissance plus soutenable et comme le signal que le modèle chinois de croissance est sur le point de s’épuiser. Comment ce ralentissement de la croissance chinoise se distingue-t-elle des épisodes similaires que les autres pays ont pu connaître par le passé ? Est-ce qu’une croissance comprise ente 6 et 7 % est soutenable pour la Chine ?

Posons ces questions au prisme du modèle que les économistes utilisent traditionnellement pour apprécier les taux de croissance des économies émergentes et des pays à faible revenu : le modèle de convergence (basé sur le travail de Robert Solow). Selon sa principale prédiction, les pays qui sont en retard devraient avoir plus d’opportunités pour l’investissement et ils sont susceptibles de croître plus rapidement que les pays qui sont déjà à la frontière technologique. Puisque les premiers ont des taux de croissance plus élevés que les seconds, nous nous attendons à voir une convergence des PIB par tête. A mesure que la convergence se poursuit, la croissance va naturellement ralentir pour rejoindre le rythme de croissance des pays à la frontière. (La théorie suggère toutefois que l’ensemble des pays ne converge pas vers le même niveau de PIB par tête, mais ignorons cela pendant une seconde et focalisons-nous sur les prédictions des taux de croissance relatifs.)

Commençons avec un exemple qui valide assez la théorie : la Corée du Sud. Représentons le niveau du PIB par tête de la Corée du Sud relativement à celui des Etats-Unis au commencement de chacune des trois dernières décennies et comparons cela avec le taux de croissance du PIB par tête durant les années qui ont suivi. (Je considère que l’ensemble de la période entre 2000 et 2014 comme la "décennie des années deux mille".)

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Le graphique ci-dessus (…) montre que la Corée du Sud commence en 1980 avec un niveau de PIB par tête inférieur à 20 % de celui des Etats-Unis, ce qui s’est traduit par une croissance annelle durant la période 1980-1990 d’environ 7 %). Cela permet au pays d’atteindre un niveau de vie s’élevant à 30 % de celui des Etats-Unis en 1990. A ce moment-là, la croissance ralentit et durant les 10 années suivantes elle a été inférieure à 5,5 %. La transition s’est ensuite poursuivie avec une croissance qui a ralenti la décennie suivante (en atteignant environ 4 %). Aujourd’hui, la Corée du Sud a un PIB par tête s’élevant à environ 65 % de celui des Etats-Unis et il est possible qu’au cours des années suivantes nous voyons un nouveau ralentissement de sa croissance dans la mesure où elle poursuit sa convergence vers les Etats-Unis.

Donc, pour l’instant, c’est bon pour notre théorie. Que dire à propos de la Chine ?

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En 1980, la Chine commence à un moindre niveau de PIB par tête et, de façon cohérente avec notre logique, un taux de croissance très rapide d’environ 7 %. Mais comme le pays converge vers les Etats-Unis, la croissance s’accélère au-dessus de 8 % durant les années quatre-vingt-dix. Une possible explication pour cette accélération est que la Chine se déplaçait vers un taux de croissance plus naturel étant donné à quel point son PIB par tête était faible relativement à, disons, la Corée du Sud. Mais au cours de la décennie suivante (2000-2014), le taux de croissance sera encore plus élevé, tendant vers 9 %. A ce moment-là, le taux de croissance semble spectaculaire par rapport au cas de la Corée du Sud. Pour mettre cela en perspective, la Chine a atteint en 2015 un PIB par tête de 25 % de celui des Etats-Unis (la ligne rouge verticale) et lorsque la Corée du Sud a atteint ce niveau elle était déjà en train de croître à un rythme inférieur à 6 % par an. La comparaison avec la Corée du Sud montre que des taux de croissance de 8-9 % en Chine, au vu de son développement courant, aurait réellement été un vrai miracle.

Et si la Corée du Sud est utilisée pour prévoir les taux de croissance futurs de la Chine ? Etant donné le PIB par tête courant de la Chine, nous prévoyons un taux de croissance légèrement inférieur à 6 % au cours de la décennie suivante. Et une croissance qui va davantage ralentir à mesure que le temps passe. Ce nombre est légèrement inférieur à la cible courante du gouvernement chinois, mais pas très éloignée dans la mesure où nous réfléchissons sur l’échelle d’une décennie et parlons d’une trajectoire susceptible d’être décroissante. (Notons que les taux de croissance ci-dessus sont des taux de croissance par tête. La population en âge de travailler n’est actuellement pas en train d’augmenter de beaucoup en Chine, donc les chiffres du PIB ne doivent pas être trop différents.)

Question finale : la Corée du Sud est-elle un bon étalon pour juger des performances chinoises ? Regardons d’autres économies potentiellement à forte croissance durant les mêmes années.

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La Corée du Sud est clairement le pays réalisant les meilleurs performances parmi les pays qui ont un niveau de vie inférieur à 50 % de celui des Etats-Unis (et, oui, il y a plein d’échecs !). Donc utiliser la Corée du Sud comme étalon nous amène à être optimistes quant à la croissance chinoise. Il y a peu d’autres pays qui apparaissent comme des anomalies (…) dans cette relation, mais il n’est pas évident qu’ils soient des exemples pertinents pour la Chine. Hong Kong et Singapour sont des petites cités-Etats. L’Irlande, dans les années quatre-vingt-dix, a connu quelque chose d’exceptionnel pour un pays européen ; les pays producteurs de pétrole (tels que la Norvège) ont des dynamiques qui ne peuvent être répliquées sans ce niveau de ressources naturelles.

En résumé, le ralentissement de la croissance économique chinoise semble comme une évolution naturelle de l’économie dans la mesure où elle suit son sentier de convergence. Les taux de croissance d’environ 6 % font toujours de la Chine le pays réalisant les meilleures performances parmi tous les pays du monde, conditionnellement à son niveau de PIB par tête. Il y a plein d’autres pays dans le monde qui montrent à quel point le taux de croissance du PIB peut être faible. Et ils peuvent constituer un bon exemple de ce qui pourrait se passer pour un pays s’il ne peut garder des politiques et des institutions de bonne qualité, relativement à son niveau courant de développement. »

Antonio Fatás, « 9, 8, 7, 6.7,... Speculating on China growth », in Antonio Fatás on the Global Economy (blog), 8 juin 2016. Traduit par Martin Anota

jeudi 12 mai 2016

La croissance nominale du PIB chinois ralentit...

GRAPHIQUE Taux de croissance du PIB nominal de la Chine (en %)

The_Economist__croissance_nominale_PIB_chinois_Chine_2012_2013_2014_2015_2016__Martin_Anota_.png

source : The Economist (2016)

mercredi 27 janvier 2016

Les autorités chinoises annoncent une croissance de 6,9 % pour 2015

GRAPHIQUE Chiffres officiels de la croissance du PIB chinois (en %)

The_Economist__chiffres_officiels_croissance_PIB_Chine_2015__Martin_Anota_.png

source : The Economist (2016)



aller plus loin... lire « Les chiffres de la croissance chinoise sont-ils fiables ? »

samedi 23 janvier 2016

Le ralentissement chinois

« Les investisseurs financiers à travers le monde regardent attentivement la chute brutale des cours boursiers en Chine. L’indice composite de la Bourse de Shanghai est désormais inférieur de 40 % à sa valeur de juin 2015. La raison pour laquelle les observateurs sont inquiets n’est pas parce qu’ils y ont eux-mêmes placé les capitaux : les actions chinoises sont majoritairement détenues par les Chinois eux-mêmes. En fait, c’est parce qu’ils interprètent cela comme une preuve d’un ralentissement de la croissance chinoise.

Le taux de croissance de la Chine a en effet ralenti et il y a plein de raisons amenant à croire que le ralentissement n’est pas juste temporaire. Mais aucune d’entre elles n’ont beaucoup à voir avec les marchés boursiers. Les prix de marché sont toujours bien au-dessus de la valeur qu’ils atteignaient en 2014. C’était une époque où plusieurs observateurs étaient baissiers en Chine et affirmaient que son économie eut juste surpassé les Etats-Unis pour devenir la plus large au monde, en s’appuyant sur les statistiques du PIB basées sur les nouvelles parités de pouvoir d’achat. Mais en fait, le ralentissement dans la croissance chinoise a commencé il y a quatre ans. Selon les statistiques officielles, la croissance atteignit en moyenne 10 % au cours de trois décennies 1980-2010, mais ralentit à la fourchette 7-8 % en 2012-2014.

En effet, la raison pour laquelle les cours boursiers chinois accélérèrent leur hausse vers la fin de 2014 est que la Banque populaire de Chine commença à réduire ses taux d’intérêt en novembre, une réponse appropriée à un ralentissement de la croissance économique qui était déjà perceptible. L’essor continu des marchés boursiers s’apparenta de plus en plus à une bulle alimentée par le crédit au printemps de l’année 2015. Le pic eut lieu le 12 juin, quand la Securities Regulatory Commission releva ses exigences en matière de marges de solvabilité.

La bulle a maintenant été inversée. Cela ne donne pas nécessairement beaucoup d’informations à propos des perspectives de croissance de la Chine. Il y a plein de raisons de ne pas être surpris que la croissance chinoise ait ralenti et de ne pas s’attendre à ce qu’elle retourne à 10 %. Certains prévisionnistes il y a cinq ans suivaient leur instinct naturel et se contaient simplement d’extrapoler les trois précédentes décennies. Mais lancer un filet statistique plus large aurait révélé qu’une quatrième décennie à 10 % aurait été historiquement sans précédents. Donc l’Empire du Milieu n’échappe pas à de régularités statistiques plus larges. Certains voient le ralentissement comme un cas de "piège du revenu intermédiaire" (ou "trappe à revenu intermédiaire"). D’autres trouvent que le schéma statistique le plus pertinent est celui de la "régression vers la moyenne" (regression to the mean) des taux de croissance.

Quelles sont les forces économiques derrière la tendance qui ralentit la forte croissance d’un pays ? Il y a une large variété d’interprétations économiques possibles. Il y en a six qui me viennent à l’esprit :

  • L’une est le rendement décroissant du capital. L’investissement de la Chine dans les infrastructures de transports et la construction résidentielle est devenu excessif.

  • Selon une autre interprétation, la croissance de la productivité est plus facile lorsqu’il s’agit d’imiter les technologies, les processus de production et les pratiques de gestion des pays occidentaux ; quand l’écart entre la frontière économique et les nouveaux venus se resserre, ces derniers doivent désormais entreprendre un peu d’innovation par eux-mêmes.

  • Une troisième explication est que la migration des campagnes vers les villes a été une puissante source de croissance chinoise, mais que le surplus de travail s’est finalement tari, les salaires augmentent et l’avantage comparatif dans les manufactures intensives en travail a été perdu. (Le "point tournant de Lewis" a été atteint.)

  • Une quatrième est que la population est vieillissante. La population en âge de travail a atteint un pic en 2012. Le ratio des personnes en âge d’aller à la retraite sur la population en âge de travail augmente. Cette transition démographique survient naturellement dans les pays avancés ; mais la politique de l’enfant unique l’a accéléré prématurément en Chine.

  • Une cinquième est que les prix de l’immobilier urbain ont été surévalués et que la "capacité de charge" de l’environnement a été épuisée.

  • Un sixième est que la composition de l’économie se réoriente de l’industrie vers les services, ce qui est approprié pour rendre la croissance soutenable, mais la croissance doit alors nécessairement ralentir car, dans tous les pays, la marge de croissance pour la productivité est moindre dans les services que dans l’industrie.


Donc le passage d’une croissance de 10 % vers une tendance à long terme plus soutenable de 5-7 % est parfaitement naturel. La question qu’il est important de se poser si la transition prend la forme d’un atterrissage en douceur ou d’un atterrissage brutal. Dans un scénario d’atterrissage en douceur, la Chine continuerait de croître à un taux tendanciel plus faible, mais soutenable. Dans le cas d’un atterrissage brutal, elle subirait une crise financière et une récession économique plus sévère.

Une forte dépendance sur les dépenses d’investissement et le financement par l’endettement peut fonctionner durant une phase de forte croissance, mais risque ensuite d’entraîner des surcapacités et une crise financière quand les taux de croissance de long terme ralentissent. Les précédents historiques incluent le Japon après les années quatre-vingt et la Corée du Sud en 1997-1998.

Certains disent que les statistiques officielles surestiment fortement le PIB chinois et que le véritable taux de croissance a déjà chuté sous les 6,9 % que le gouvernement a annoncés pour 2015. C’est en effet curieux que les statistiques de croissance officielles semblent la plupart du temps proches des chiffres qui avaient été annoncés bien auparavant lors de la conception des plans. Donc les sceptiques se tournent naturellement vers des mesures plus tangibles. Ils notent que la consommation d’énergie, l’activité ferroviaire et la production de produits industriels comme le charbon, le métal et le ciment ont fortement ralenti (ce sont des composantes du soi-disant indice de Keqiang). Mais Nicholas Lardy affirme de façon convaincante que ces statistiques sont également cohérentes avec l’interprétation selon laquelle la composition de l’économie chinoise s’est réorientée de l’industrie lourde vers les services.

La réorientation de la production de l’industrie vers les services est l’une des conditions (…) de la transition vers un taux de croissance soutenable. Cette dernière passe aussi par la réduction de la dépendance vis-à-vis des dépenses d’investissement et de la demande d’exportation et ainsi par un plus grand rôle pour la consommation des ménages. D’autres réformes désirables incluent l’accroissement de la flexibilité des marchés fonciers et des marchés du travail. Par exemple, la mobilité du travail est toujours freinée par la précarité des droits fonciers dans les campagnes et par le système houkou dans les villes. Plus généralement, les marchés doivent continuer à jouer un rôle plus important dans l’économie. Les entreprises publiques doivent laisser de la place aux entreprises privées. Des réformes sont également nécessaires dans la santé, la sécurité sociale et le système fiscal. Et, bien sûr, il faut resserrer la réglementation environnementale et mettre fin à la politique de l’enfant unique.

Les économistes et dirigeants chinois savent tout ça. En effet le Troisième Plénum du Parti communiste de 2013 a abouti à une liste (…) de réformes. Pékin a mis en œuvre une partie de ces réformes au cours des deux années suivantes. Mais il y a encore beaucoup de chemin à faire et rien ne garantit que la mise en œuvre des réformes soit une pleine réussite. Comme Shang-Jin Wei de la Banque du Développement asiatique le souligne, le destin de l’économie chinoise dépend bien plus du rythme et du contenu des réformes plutôt que de la bulle boursière de l’année dernière et de son éclatement subséquent. »

Jeffrey Frankel (2016), « China’s slowdown », in Econbrowser (blog), 22 janvier 2016. Traduit par Martin Anota



aller plus loin...

« Les chiffres de la croissance chinoise sont-ils fiables ? »

« Anatomie de la croissance chinoise »

« Perspectives chinoises »

« La Chine rencontre Solow. Autour de l'épuisement du modèle de croissance chinois »

« Boucles d’Or peut-elle vaincre les ours ? Retour sur la croissance chinoise »

mercredi 13 janvier 2016

La prochaine récession mondiale viendra-t-elle de Chine ?

« Les nouvelles de Chine ne sont pas très bonnes. Il y a de nombreux articles aux titres inquiétants. Le Wall Street Journal s’est par exemple demandé en août si une récession mondiale se préparait en Chine. Wonkblog se demande comment la Chine peut enclencher une crise mondiale : "Lorsque la Chine éternue, le reste du monde peut s’enrhumer, mais les choses semblent mieux aller au bout de deux jours. La question qui se pose alors est si la Chine est bien plus malade qu’elle ne le paraît et à quel point cela sera contagieux pour l’économie mondiale."

Une thèse courante est que la crise en Chine amène les autorités locales à chercher à dévaluer le yuan, ce qui pourrait enclencher une guerre de devises. Je ne doute pas que les valeurs des devises des pays émergents reposent, dans plusieurs cas, sur la valeur de la devise chinoise ou des prix des matières premières. Il est difficile de distinguer entre les répercussions que le resserrement de la politique monétaire américaine est susceptible d’avoir sur les devises des pays émergents des répercussions du ralentissement de la croissance chinoise.

Croissance chinoise et croissance mondiale


Je vais adopter une approche quelque peu différente, qui consiste à estimer les variations du PIB mondial sous diverses hypothèses. Je vais comparer les variations prévues en utilisant les Prévisions de l’économie mondiale avec celles que j’obtiens en supposant que la croissance réelle soit divisée par deux entre 2016 et 2018. Ces deux ralentissements sont présentés sur les graphiques 1 et 2.

GRAPHIQUE 1 Contributions à la croissance mondiale (en milliers de milliards de dollars aux taux de change de marchés)

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Les calculs ci-dessus supposent qu’il n’y a pas d’effets de débordement, par exemple que le ralentissement de la croissance chinoise n’a pas d’impact sur la croissance du teste du monde. S’il y a des effets multiplicateurs, alors la croissance du reste du monde sera plus faible. Cela ne révèle pas une récession mondiale, mais nous sommes dans un territoire peu connu.

GRAPHIQUE 2 Contributions à la croissance mondiale sous l’hypothèse d’une croissance chinoise divisée par deux (en milliers de milliards de dollars aux taux de change de marchés)

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Les précédents historiques


Comme Kose et Terrones (2015) l’ont souligné, les quatre récessions mondiales après 1960 ont toutes impliqué les Etats-Unis (mais toutes les récessions américaines n’ont pas été des récessions mondiales). On peut alors se demander si le ralentissement de la croissance chinoise laisse présager une nouvelle ère où les récessions mondiales trouvent leurs origines dans les fluctuations de l’activité chinoise, de la même manière que l’essor des Etats-Unis au dix-neuvième siècle fut signalé par l’impact mondial de la panique de 1857 et la subséquente récession. Comme l’ont noté Bordo et Landon-Lane, "La crise de 1857 éclata aux Etats-Unis avec la faillite de la Ohio Life Insurance Company, qui entraîna un krach boursier et une panique bancaire. La crise préfigura l’importance des Etats-Unis dans les futures crises financières mondiales. Des paniques bancaires majeures se sont également produites à Londres et en Allemagne."

Bordo et Landon-Lane notent également que "les crises financières internationales depuis au moins 1857 surviennent lorsque les Etats-Unis (qui constituent la plus grosse économie au monde depuis la fin du dix-neuvième siècle) sont impliqués. Une possible raison expliquant l’implication des Etats-Unis dans les crises financières mondiales est que le système bancaire américain est depuis longtemps propice aux crises."

La première observation de Bordo et Landon-Lane m’amène à comparer les PIB relatifs (cf. graphiques 3 et 4)

GRAPHIQUE 3 Ratio PIB nominal des Etats-Unis sur PIB nominal du Royaume-Uni aux taux de change de marchés

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GRAPHIQUE 4 Ratio PIB nominal de la Chine sur PIB nominal des Etats-Unis (en bleu) et ratio PIB nominal de la Chine sur PIB des Etats-Unis (en rouge) aux taux de change de marchés

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En d’autres mots, les Etats-Unis ont supplanté le Royaume-Uni en tant que plus grande économie au monde lorsque la panique de 1857 déclencha une crise mondiale. A l’inverse, la Chine est en train de supplanter la zone euro, mais elle a encore à supplanter les Etats-Unis, du moins aux taux de change courants (les PPA rapportent un résultat différent). Cela suggère (mais ne prouve pas) qu’une récession mondiale d’origine chinoise soit improbable.

La seconde observation de Bordo et Landon-Lane suggère que l’importance de forts liens financiers est un facteur clé dans la propagation de crise. Ici, la segmentation continue du secteur bancaire chinois du système financier mondiale se révèle importante. Non seulement les contrôles de capitaux segmentent le marché chinois, mais le système bancaire très réglementé isole le reste du monde des problèmes bancaires chinois (dans tous les cas, la Chine semble avoir d’amples ressources pour recapitaliser le système bancaire, si cela s’avère nécessaire).

Evidemment, la Chine est liée financièrement au reste du monde dans la mesure où elle est un créancier net et où elle détient des bons du Trésor américains. Donc il n’est pas dit qu’une crise sévère en Chine n’aura pas d’impacts négatifs sur le reste du monde. En fait, je pense plutôt que les modes de transmission seront plus traditionnels, c’est-à-dire passer par les flux d’échanges commerciaux, les prix des matières premières et peut-être les taux d’intérêt.

Une dernière mise en garde à propos des prévisions de croissance chinoise


Les estimations de la croissance chinoise varient fortement d’une étude à l’autre. Cela s’explique en partie parce que les estimations de la croissance dépendent des vues quant aux politiques publiques. Si l’on considère que le gouvernement s’est engagé à maintenir la croissance au-dessus d’un certain seuil, alors on ne peut qu’envisager la possibilité que les autorités sacrifient les réformes pour la relance continue, c’est-à-dire la possibilité que la croissance de court terme ne s’écroule pas, même si les perspectives de long terme s’en trouvent affaiblies. Par contre, si l’on croit que le gouvernement va mener un programme de libéralisation financière et chercher à rééquilibrer la croissance vers des sources domestiques, alors la croissance peut très bien tomber bien en-deçà de 6 % à court terme. Je suis sceptique quant à ce second scénario. »

Menzie Chinn (2016), « The next global recession: Made in China? », in Econbrowser (blog), 13 janvier 2016. Traduit par Martin Anota



aller plus loin...

« Quelles seraient les répercussions internationales d’un atterrissage brutal de l’économie chinoise ? »

« Les pays avancés sont-ils à l’abri du ralentissement de la croissance des pays émergents ? »

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