« Ces dernières années, les taux d’intérêt dans les EME et les économies avancées ont évolué parallèlement à ceux des grandes économies avancées, et notamment des États-Unis. Cette corrélation étroite pourrait, certes, traduire une réaction à des événements macroéconomiques communs affectant tous les pays. Mais elle pourrait aussi refléter les répercussions internationales des taux d’intérêt observés dans les grandes économies avancées. Ces répercussions peuvent s’expliquer de deux façons : premièrement, par des politiques de change explicites ou des efforts visant à contenir les pressions sur les taux de change et sur les flux de capitaux qu’exercent les différences de rendement visà-vis des principales monnaies ; deuxièmement, par les arbitrages des investisseurs internationaux, qui établissent des liens entre les taux prévalant sur les différents marchés de capitaux.

Afin de faire la lumière sur cette question, un groupe de 30 économies (EME et économies avancées) a été étudié sur la période 2000–2014 à l’aide d’une analyse de régression. Cette analyse démontre une étroite relation entre les variations des taux d’intérêt dans ces économies et aux États-Unis, même après correction des conditions macroéconomiques nationales et du cycle économique et financier mondial. En ce qui concerne les taux courts, une variation de 100 points de base des taux américains correspond à une variation moyenne de 34 points de base dans les EME et les petites économies avancées. Pour ce qui est des taux longs, l’effet est encore plus prononcé : une variation de 100 points de base des rendements obligataires américains est associée à une fluctuation de 59 points de base en moyenne des rendements dans ces mêmes économies. Outre les taux d’intérêt américains, le degré d’aversion pour le risque des investisseurs internationaux (tel que mesuré par le VIX) se révèle invariablement être un autre déterminant important de ces taux.

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De plus, le niveau obstinément faible des taux directeurs mondiaux par rapport aux niveaux donnés par la règle de Taylor, depuis le début des années 2000 (cf. graphique), reflète, en partie au moins, le niveau des taux directeurs en vigueur aux États-Unis pendant cette période. Par exemple, un abaissement de 100 points de base du taux des fonds fédéraux américains fait diminuer de 43 points de base les taux directeurs des EME et d’autres économies avancées par rapport aux niveaux calculés selon la règle de Taylor normative classique. Avec une règle de Taylor descriptive, l’effet estimé du taux directeur américain est encore plus fort : quelque 70 points de base. En résumé, les résultats indiquent une relation de cause à effet économiquement significative qui va des taux d’intérêt américains aux taux des autres économies, émergentes et avancées. »

Banque des Règlements Internationaux, « Contagion monétaire entre pays », 85e rapport annuel, 28 juin 2015, pp. 119-120. D’après B. Hofmann et E. Takáts, « International monetary spillovers », à paraître.



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