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Tag - politique de la concurrence

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samedi 30 novembre 2019

Le fléau des grosses entreprises



« Les titans des nouvelles technologies comme Amazon, Google, Facebook et Apple dominent leurs marchés respectifs et sont de plus en plus puissants. Maintenant, un chœur de critiques appelle à les démanteler. Nous avions connu un tel contexte par le passé. Il y a plus d’un siècle, c’était la Standard Oil qui fut accusée de pratiques anticoncurrentielles. Ensuite, il y a eu le secteur du conditionnement de viande, celui de la production de métal et celui des télécommunications. Chaque phase présenta des questions uniques à propos de la façon d’agir face aux sociétés puissantes. Naomi Lamoreaux pense qu’il est utile de revisiter cette histoire.

AEA : Quelles leçons l’histoire des entreprises comme la Standard Oil pourraient nous être utiles aujourd’hui ?

Naomi Lamoreaux : Il s’agissait d’entreprises très très grandes et elles suscitaient des craintes qui ressemblent à celles que suscitent les grandes entreprises aujourd’hui : des craintes à propos de possibles manipulations déloyales des opportunités économiques, des craintes à propos de leur influence politique, la crainte qu’une grande taille et un ample patrimoine puissent nuire à l’économie, à la société, à la politique de façons complexes et opaques.

AEA : Comment pouvez-vous brièvement décrire ce que la Standard Oil était et sa domination des marchés de l’énergie ?

Lamoreaux : La Standard Oil était un raffineur de pétrole brut. Initialement, son principal produit était le kérosène, qui était utilisé à des fins d’éclairage. Plus tard, elle devint un producteur de gazolène, mais son monopole était initialement un monopole dans l’éclairage, le kérosène. Initialement, elle ne représentait qu’environ 4 % des capacités de raffinage du pays. Cette part était de 4 % en 1870 ; elle s’élevait à 90 % une décennie après. Ainsi, cela effraya la population et fit sonner le signal d’alarme.

AEA : Comment est-elle devenue si grosse aussi rapidement ?

Lamoreaux : Fondamentalement, elle a été capable de s’approprier des avantages déloyaux sur ses rivales au moyen de rabais dans le transport ferroviaire. Une bonne partie du prix du pétrole tenait aux coûts de transport du pétrole et la Standard a été capable d’obtenir de moindres coûts de transport que ses rivales grâce au transport ferroviaire et d’utiliser ensuite cet avantage pour forcer ses rivales à quitter le marché ou à se vendre à elle.

AEA : Quand est-ce que les régulateurs commencèrent à s’attaquer à la Standard Oil ?

Lamoreaux : Les premiers régulateurs qui agirent opéraient au niveau des Etats fédérés. Les Etats répondirent à l’émergence de la Standard Oil et à d’autres imitateurs de la Standard Oil avec une législation que nous qualifierons aujourd’hui de législation antitrust à la fin des années 1880.

Le Congrès fit face à des pressions pour engager des actions, donc il adopta une loi en 1980 appelée le Sherman Antitrust Act, qui est la première loi antitrust au niveau fédéral qui transforma en crime toute tentative de monopoliser le commerce ou de s’engager dans la restriction des activités commerciales. Le problème avec cette loi était qu’elle était bien plus difficile de l’appliquer aux sociétés à charte d’Etat fédéré. Des sociétés comme la Standard Oil souscrivirent à la charte d’Etats bienveillants comme le New Jersey. La Standard pouvait être un monopole, mais elle opérait sous une charte du New Jersey et, selon la loi du New Jersey, c’était une entreprise légale. Cela posa des problèmes pour les régulateurs fédéraux. Il fallut attendre 1911 pour que les régulateurs trouvent comment agir avec une société comme la Standard. La Cour Suprême prit alors deux décisions, la première concernant la Standard Oil Company et la seconde concernant l’American Tobacco Company, celles de démanteler ces sociétés au motif qu’elles s’étaient engagées dans des activités anticoncurrentielles.

AEA : Il y a une ligne ténue entre les pratiques des entreprises qui s’avèrent anticoncurrentielles et dangereuses et celles qui améliorent l’efficience. Pouvez-vous décrire l’évolution dans notre façon de voir ce qui est dangereux et ce qui ne l’est pas ?

Lamoreaux : Il y avait d’un côté l’idée que ces grandes firmes qui émergeaient dans plusieurs secteurs de l’économie (…) avaient fait des choses bénéfiques, comme réduire le coût des biens pour les consommateurs, améliorer l’efficience et fournir de nouveaux biens aux consommateurs. Elles étaient grandes et connaissaient le succès et parce qu’elles connaissaient le succès elles disposaient d’un pouvoir de marché. Les gens voulaient trouver des façons de distinguer entre, d’un côté, ces firmes et, de l’autre, les firmes qui grossissaient en restreignant la concurrence en disposant d’avantages déloyaux. Le problème est qu’il est difficile de ranger clairement les entreprises dans l’une ou l’autre de ces catégories. Les entreprises les plus efficientes, les plus innovantes, peuvent faire des choses qui visaient à bloquer la concurrence future. Elles peuvent s’engager dans des pratiques que nous considérons comme déloyales et anticoncurrentielles.

Ensuite, au cours du vingtième siècle, les responsables de la politique publique cherchèrent tout d’abord à identifier ces types de comportements et à simplement stopper les mauvais comportements. Mais à la fin des années 1930, elles commencèrent à se dire qu’elles ne pouvaient vraiment pas faire cela. La grosse taille était mauvaise en soi et les régulateurs poursuivirent alors simplement des politiques qui visaient à réduire la part de marché des grosses firmes, que celles-ci se comportent mal ou non. Et cette vision de ce que doit faire la politique antitrust a vraiment émergé à la fin des années 1930 et elle a demeura jusqu’au début des années 1970. Ensuite, nous avons basculé à l’opposé et considéré que la grosse taille n’était pas un problème aussi longtemps que les entreprises offrent des gains aux consommateurs et qu’il n’y avait pas à s’inquiéter du tout de cela. Et maintenant les gens commencent à reconsidérer de nouveau les choses.

AEA : Vous faites référence ici à la tension entre l’Ecole de Chicago et ceux que l’on qualifie de "néo- brandeisiens" (New Brandeisians). Pouvez-vous expliquer en quoi tiennent les différences entre leurs raisonnements ?

Lamoreaux : La position de l’Ecole de Chicago était que la taille ne doit pas être un problème si la taille était le produit d’une plus grande efficience. Mon vieux collègue Harold Demsetz affirmait que les grandes entreprises avaient souvent un pouvoir de marché parce qu’elles avaient vraiment réussi et que vous ne voulez pas punir cela. Donc, fondamentalement, la taille n’était pas du tout considérée comme un problème et, aussi longtemps que les entreprises ne faisaient pas de choses qui nuisaient aux consommateurs, ne restreignaient pas la production, ne s’entendaient pas pour maintenir des prix élevés, il n’y avait pas de problème avec la taille.

Les "néo-brandeisiens" voient les choses très différemment. Ils se qualifient de néo-brandeisiens parce que leur vision du monde est très similaire à celle de Louis Brandeis. Pour ce dernier, les grandes entreprises étaient sources de menaces sur plusieurs plans. Si elles peuvent apporter des bénéfices aux consommateurs à court terme, elles peuvent étouffer l’innovation à long terme. Elles peuvent protéger leur position en recourant au lobbying pour empêcher le Congrès ou d’autres autorités de prendre des décisions susceptibles de réduire leur puissance. Et, bien sûr, les gens s’inquiètent à propos de plein d’autres choses relatives à la grande taille qui ne sont pas liées à la politique antitrust, mais sont des inquiétudes sociales comme le contrôle de l’information.

AEA : Quelle est la leçon la plus importante que, selon vous, l’Histoire a à offrir pour aujourd’hui ?

Lamoreaux : Je dirai deux choses. La première est que les inquiétudes à propos de la grande taille des entreprises ont toujours été multidimensionnelles et ne peuvent être réduites la simple question quant à savoir si les consommateurs en sont affectés dans une statique comparative. Le second point est qu’essayer de savoir si une grande entreprise fait du mal ou non, se comporte mal ou non, est en fait une tâche très épineuse. Parce que cette tâche est si difficile, nous avons (…) baissé les bras et dit que nous ne fixerions pas de limite.

C’est une illusion de penser qu’il n’y a qu’un seul principe qui nous permettrait d’échapper à ce genre de questions de jugement. Et les questions de jugement vont toujours être imparfaites. C’est intrinsèque aux systèmes politiques. C’est intrinsèque au système de régulation. Cela implique toujours un jugement. Et nous allons toujours nous tromper dans un sens ou un autre. Mais c’est là où nous devons travailler : chercher la bonne solution. Nous n’aurons jamais la bonne solution, mais nous devons essayer de l’avoir. »

American Economic Association, « The curse of bigness », 30 août 2019. Traduit par Martin Anota



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lundi 18 mars 2019

La fusion Alstom-Siemens et le besoin de champions industriels européens

« La Commission européenne a refusé la fusion entre Alstom et Siemens, déclenchant par là l’ire des gouvernements français et allemand. Une proposition franco-allemande de refonder le contrôle des fusions dans l’Union européenne a donné lieu à un intense débat sur le besoin de champions européens…

Siemens et Alstom, les deux plus gros fournisseurs du marché du rail, devaient obtenir l’aval de la Commission européenne pour fusionner et ainsi devenir un véritable "champion européen" qui aurait ainsi acquis au niveau mondial une position dominante dans ce secteur. Mais le 6 février 2019, la Commission européenne a refusé, au motif que "la fusion aurait nuit à la concurrence sur les marchés des systèmes de signalisation ferroviaire et des trains à très grande vitesse".

Cette décision a attiré l’attention pour deux raison. Premièrement, les fusions sont rarement interdites en Europe. Comme l’expliquent Patrick Rey et Jean Tirole, "en 2018, par exemple, la Commission a approuvé 370 fusions sans condition et 23 autres en les soumettant à des conditions (ou engagements), dans la plupart des cas après une courte enquête d’un mois. Par ailleurs, la Commission n’a rejeté que deux fusions en 2017, aucune en 2018 et moins de 30 depuis l’adoption de la réglementation de l’UE sur les concentrations en 1990". Deuxièmement, le projet de fusion avait l’aval des gouvernements français et allemand et ces derniers ont durement et ouvertement critiqué la décision de la Commission européenne.

Suite à la décision de la Commission européenne, les ministres des deux pays ont établi un "manifeste franco-allemand pour une politique industrielle européenne adaptée au vingt-et-unième siècle" qui repose sur trois piliers : regrouper des ressources pour un investissement "massif" dans l’innovation ; adopter des mesures défensives, telles qu’un cadre de surveillance européen des investissements étrangers et un mécanisme de réciprocité pour les marchés publics avec des pays tiers ; et, enfin, procéder à des changements dans le cadre réglementaire de la politique de la concurrence européenne. Ces changements incluent une révision "des lignes directrices actuelles en matière de concentrations pour mieux tenir compte de la concurrence au niveau mondial, de la concurrence potentielle future et du calendrier de développement de la concurrence afin de donner à la Commission européenne plus de flexibilité dans son appréciation des marchés pertinents" et la possibilité d’un droit de recours du Conseil, sous certaines conditions, qui pourrait revenir sur les décisions de la Commission.

En conséquence de la fusion avortée entre Alstom et Siemens et des propositions franco-allemandes, un débat s’est amorcé : La politique de la concurrence de l’UE doit-elle être changée pour faciliter la formation de "champions européens" ? Et est-ce une condition nécessaire pour les entreprises européennes pour être capable d’affronter la concurrence mondiale ?

Pour les partisans de la fusion Alstom-Siemens, le contexte est important. C’est celui de l’ascension de CRRC, un mastodonte chinois du secteur ferroviaire qui résulte lui-même d’une fusion et qui est dopé par la croissance rapide d’un marché chinois largement fermé. Comme Elie Cohen l’écrit, "là où Alstom et Siemens se battent pour se partager une production annuelle de 35 TGV par an, CRRC en fait 230 ! Là où le marché européen de la grande vitesse stagne, la Chine vient de lancer un plan supplémentaire d’investissement de 125 milliards de dollars pour construire 3200 km de lignes TGV venant s’ajouter à un réseau de 25000 km !"

Donc, Cohen résume l’argument clé en faveur de la fusion : le marché ferroviaire européen est saturé, les vrais marchés sont à l’étranger, donc la concurrence nuit aux deux entreprises en termes de compétitivité mondiale. De plus, un champion européen serait en meilleure position pour résister à l’hégémonie prochaine de CRRC. Ou, comme le dit Guy Verhofstadt, "même si Alstom et Siemens ont tous deux réussi à gagner des contrats dans plusieurs pays occidentaux et africains ces dernières années, leur chance pourrait bientôt s’évanouir" et "s’il n’y a pas de plus forte réponse de la part de l’Europe, il ne s’agit pas de savoir si mais quand la Chine deviendra un acteur dominant dans le marché du rail mondial".

Dans ce contexte, les règles européennes sur la définition du marché pertinent deviennent particulièrement importantes pour statuer sur le cas de la fusion Alstom-Siemens, d’où la proposition franco-allemande de les réviser. Comme Verhofstadt l’affirme, en suivant les règles la Commission avait à "considérer l’impact potentiel de la fusion sur les marchés européens et régionaux en décidant de l’approuver ou de la rejeter". "Mais le marché du rail dans lequel Alstom et Siemens opèrent est mondial, ce qui signifie que l’évaluation d’une position dominante ou des entraves à la concurrence doit aussi tenir compte des concurrents basés au Japon, en Corée du Sud, en Chine et ailleurs", ajoute-t-il. Donc, en conclut-il, les règles européennes de contrôle des fusions doivent devenir plus flexibles et prospectives. Plus généralement, pour Verhofstadt et Cohen, le cadre de concurrence doit prendre en compte des intérêts stratégiques plus larges et les implications à long terme des menaces géopolitiques.

Par conséquent, bien qu’il rejette clairement un droit de recours par des Etats-membres qui dérogerait aux décisions de la Commission, Verhofstadt se prononce en faveur d’une refonte des règles pour faciliter l’émergence de champions européens. Il maintient que, pour affronter la concurrence mondiale, les entreprises européennes ont besoin de gagner en taille et que, pour cela, il préconise des "champions européens" à la Airbus.

Adoptant le point de vue opposé, Patrick Rey et Jean Tirole doutent que l’on puisse faire une analogie avec Airbus. "Dans le cas d’Airbus, il s’agissait de créer un concurrent à Boeing, qui détenait alors un quasi-monopole sur le marché de l’aviation commerciale. La fusion Alstom-Siemens aurait au contraire réduit le nombre d’acteurs dans l’industrie ferroviaire en Europe".

De plus, Martin Sandbu cite le journaliste Chris Bryant de Bloomberg pour suggérer que le désavantage compétitif des deux entreprises est exagéré : les recettes de CRRC sont en effet plus larges que celles d’Alstom et Siemens combinées, mais presque sa totalité viennent du marché chinois, tandis que sur les marchés internationaux, les deux entreprises européennes pèsent trois fois plus que CRRC.

Plus généralement, Massimo Motta et Martin Peitz soulignent qu’il n’y a rien dans le contrôle des fusions qui empêche la formation de champions européens, à condition qu’il y ait assez de gains d’efficacité (des synergies et des complémentarités) pour compenser les effets anticoncurrentiels à court terme (prix plus élevés, moindre choix pour les demandeurs) et à long terme (moins d’investissement, d’innovation et de qualité). "Mais dans le cas Siemens-Alstom, il n’y a pas d’information publique qui certifie qu’il y ait de telles synergies et la Commission européenne a déclaré que les partis n’ont pas démontré qu’il était possible d’obtenir de tels gains d’efficacité", ajoutent-ils.

Les deux économistes remarquent que la création de champions européens serait empêchée par le contrôle de fusions dans de le cas où il y a des gains d’efficacité en termes de compétitivité internationale (plus de ventes à l’étranger) insuffisants pour compenser les méfaits sur le consommateur européen (des prix plus élevés). Selon les deux auteurs, alors que de telles situations doivent retenir l’attention, il s’agit plus souvent de possibilités théoriques que de cas effectifs et "en se basant sur les constats de la Commission européenne, Siemens/Alstom n’auraient définitivement pas été l’un de ces cas". Dans tous les cas, ils suggèrent qu’un partenariat (ou un autre contrat) pour coordonner les ventes et la production étrangères permettent d’obtenir de tels gains d’efficacité sans recourir à une fusion.

Pourtant, Motta et Peitz reconnaissent que l’efficacité économique ne doit pas être le seul principe guidant la politique de la concurrence. Pour autant, ils soulignent qu’empêcher une position dominante sur un marché qui affecte la sécurité de l’approvisionnement, ou des considérations stratégiques (militaires ou non), est un bon argument pour bloquer une fusion, non pour en autoriser une. Ils concèdent aussi que les règles de la concurrence peuvent ne pas être adéquates pour empêcher des pratiques déloyales par des entreprises extra-européennes. A ce sujet, ils proposent de recourir à "une intervention préventive (par exemple en excluant des appels d’offres les entreprises extra-européennes soupçonnées de s’engager dans de telles pratiques) ou de recourir à des dispositions anti-dumping", tout en notant que, en l’absence de concurrence exercée par les entreprises extra-européennes, la concurrence entre les entreprises européennes devient plus impérieuse.

Enfin, tous les auteurs craignent les dérives qu’il y aurait à donner aux Etats-membres leur mot à dire sur la politique de la concurrence. "Cette révolte contre le régime de concurrence européen est une vieille tentation de cartellisation nationale pointant le bout de son nez au niveau européen", écrit Martin Sandbu. Rey et Tirole soulignent que "les politiciens sont sujets au lobbying intense de grandes entreprises et d’organisations industrielles susceptibles d’être plus intéressées par la limitation de la concurrence que par son encouragement". Motta et Peitz craignent que "sous couvert de permettre la formation de champions européens anticoncurrentiels, les objectifs politiques de court terme qui jouissent d’un rapide soutien populaire guide la prise de décision".

Donc, est-il possible de réconcilier une politique industrielle européenne avec la politique de la concurrence ? Le verre semble à moitié plein : tous les commentaires recensés ici, indépendamment de leur opinion sur la fusion entre Alstom et Siemens, soulignent la nécessité de soutenir l’investissement dans l’innovation et de favoriser l’examen des investissements étrangers et l’accès réciproque aux marchés. Gerogios Petropoulos et Guntram Wolff ajoutent qu’au-delà des instruments défensifs qui répondent aux inquiétudes relatives aux subventions publiques, "la vraie question est de savoir si l’UE va renforcer son marché unique, accroître les dépenses en recherche-développement, redorer le blason de ses universités et concevoir une véritable stratégie intégrée en matière d’intelligence artificielle".

Mais sur le besoin de champions européens et l’attitude de la politique de la concurrence à son égard, le consensus est loin d’être atteint comme le confirme un sondage réalisé parmi le panel d’experts économiques européen IGM. Dans le sondage, il a été demandé à des économistes européens s’ils étaient d’accord ou non avec les deux déclarations suivantes : "l’Européen moyen voit sa situation s’améliorer si les autorités européennes de la concurrence laissent les entreprises fusionner pour former des champions européens dans leurs secteurs, même si cela affaiblit la concurrence" et "si la Chine et d’autres pays utilisent des politiques qui créent des entreprises internationales géantes, alors l’Européen moyen voit sa situation s’améliorer si les autorités européennes de la concurrence laissent les entreprises fusionnent pour former des champions européens dans leurs secteurs, même si cela affaiblit la concurrence". (…) Bien que la majorité se déclare en désaccord avec les deux affirmations, une part significative des répondants se déclarent incertains. »

Konstantinos Efstathiou, « The Alstom-Siemens merger and the need for European champions », in Bruegel (blog), 11 mars 2019. Traduit par Martin Anota