« Les nouveaux diplômés font face à des opportunités d’emploi assez sombres. Beaucoup ne vont pas pouvoir trouver un emploi à plein temps après avoir fini leurs études, aussi bien avec un diplôme du secondaire qu'avec un diplôme du supérieur. La détérioration du marché du travail va aussi avoir des répercussions durables. (...)

Une analyse que nous avons menée, mes collègues et moi, au Canada a examiné les conséquences qu’il y a eu à arrêter ses études lors d’une récession au cours des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. Au cours de la première année qui suit l’obtention du diplôme, les rémunérations étaient environ 10 % à 15 % inférieures, en moyenne, par rapport à celles obtenues par ceux qui ont arrêté leurs études lorsque le taux de chômage était inférieur de 3 à 4 points de pourcentage. Les rémunérations étaient inférieures lorsqu’ils trouvaient un emploi, même cinq ans après. L’écart disparaît une décennie après, mais alors ceux qui sont arrivés sur le marché du travail lors de la récession subissent une perte de 5 % sur l’ensemble des rémunérations au cours de leur carrière.

Les études portant sur les marchés du travail européens aboutissent à des constats similaires. Cependant, les diplômés du supérieur qui arrêtent leurs études lors d’une récession dans les pays avec un salaire minimum élevé et une plus forte protection de l’emploi subissent de moindres pertes de salaires à court terme, mais des pertes plus importantes à long terme que dans les pays avec un marché du travail plus flexible. Ces études constatent aussi que les rémunérations des diplômés du supérieur sont affectées plusieurs années après qu'ils soient entrés dans la vie active lors d’une récession.

D’autres études constatent que ceux qui arrêtent leurs études lors d’une récession connaissent davantage de problèmes de santé à long terme et perdent notamment en conséquence une demi-année d’espérance de vie.

Les conséquences de la récession du Covid-19 peuvent être encore plus sévères. Ceux qui arrêteront leurs études cette année feront face à une situation sur le marché du travail bien pire que celles qui ont été analysées dans les précédentes études. La faillite des entreprises va particulièrement compliquer la recherche d’un emploi. Plus les mesures de confinement dureront et plus la récession durera, plus les nouveaux diplômés seront poussés à accepter des emplois peu rémunérés et éloignés de leur domaine d’étude.

Il y a des façons de réduire ces effets négatifs. A court terme, les emplois disponibles sont susceptibles d’être extrêmement rares. Les jeunes devraient chercher à acquérir de nouvelles compétences, par exemple en suivant des cours en ligne ou même en restant à l’école. C’est le moment de poursuivre un cursus d’une année ou deux menant à des rémunérations plus élevées, une nouvelle carrière ou une entrée sur le marché du travail en des temps meilleurs.

Le bénévolat constitue une autre option. Plusieurs organisations et ménages ont actuellement besoin d’aide. Le bénévolat ne bénéfice pas seulement aux autres, mais accroît aussi le bien-être des bénévoles. Il améliore aussi les compétences que les employeurs valorisent. Une étude, par exemple, a constaté que les curriculum vitæ qui incluaient aléatoirement une expérience dans le bénévolat étaient davantage susceptibles d’aboutir à une invitation à un entretien d’embauche que les autres. (...) »

Philip Oreopoulos,« Graduating during the Covid-19 recession », IZA, 21 mai 2020. Traduit par Martin Anota



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